Titre

Sedation pour anesthesie loco-regionale

Auteur

Dr Emmanuel Salles

GHICL   Lille

 

1.     Indications générales

·        L'anesthésie loco-régionale a, entre autre intérêt, de maintenir les patients éveillés lors d’un acte chirurgical. Le confort des patients physique et psychologique ne doit pas en souffrir, car pour la plupart des patients, le bloc opératoire est un univers hostile et angoissant.

·        Les objectifs de la sédation durant une ALR sont d’abord la sécurité puis la satisfaction du patient.

·        L'amélioration du confort du patient ne peut se résumer à l'utilisation d'adjuvants pharmacologiques (primum non nocere).

2.    Moyens non-pharmacologiques 

 

1.     Consultation préanesthésique :

La décision de pratiquer une anesthésie locorégionale et le choix de la technique à effectuer, doivent être pris lors consultation ou en visite préanesthésique (urgence).

Encore plus que pour une anesthésie générale, il faut :

·                    informer sur la réalisation et les complications possibles, en fonction de sa capacité de compréhension du déroulement de la procédure.

·                    expliquer l’intérêt de la technique, son déroulement, la prise en charge de la douleur une fois le bloc régressé.

·                    rassurer quant aux complications et à la gestion un échec partiel ou total.

Ceci en général contribue à diminuer le stress lié à une intervention chirurgicale.

2.    Maîtrise de l'environnement 

L'arrivée au bloc opératoire est un moment d'inquiétude pour les patients.

Des mesures simples et de bon sens sont nécessaires :

·                    Accueil personnalisé,

·                    Environnement calme en dehors des cris et de l'agitation

·                    Intérêt d'un environnement musical [8, 9].

·                    Etre attentif aux commentaires de l'ensemble des personnels soignants entre eux et le concernant.

·                    Réchauffement externe systématique.

·                    Vérifier l’installation et l’absence de point de compression.

Lors d’une anesthésie médullaire : Contrôle de l'hypothermie et des frissons :

·                    L’anesthésie médullaire provoque une diminution de la température centrale qui résulte du bloc sympathique (vasoplégie).

·                    La prévention et le traitement comprend un réchauffement préalable du patient. La clonidine, fréquemment utilisée en prémédication ou dans les solutions d'anesthésiques locaux, prévient ou traite ce type de frisson.

·                    Enfin, le réchauffement lui même contribue à la sédation des patients et à leur bien-être.

3.    Effet sédatif de l'anesthésie Locoregionale médullaire :

Gentili et coll. ont pu démontrer que, plus le bloc central était étendu, plus les patients étaient sédatés. La sédation résulterait d'une perte de la sensibilité et donc des stimulations afférentes proprioceptives ainsi que de la perte des afférences provenant des  récepteurs de tension musculaires et articulaires. Ces stimulations concernant le sens de position du corps seraient un des facteurs permettant le maintient de I'éveil.

3.    Moyens pharmacologiques :

Ces observations illustrent le fait que, dans bien des cas, aucune sédation pharmacologique n'est nécessaire. Réciproquement, il faut être prudent lors de la sédation de patients sous ALR médullaire.

S'aider d'une sédation pharmacologique requiert une surveillance vigilante. Elle n’est envisagée qu’une fois les autres éléments de confort reunis mais insuffisants.

1.                Prémédication

Objectif : réduire l'anxiété des patients tout en préservant la coopération des patients.

Diverses molécules sont utilisées, parmi lesquelles :

·        Les benzodiazopines : sédatives, anxiolytiques et amnésiantes, mais responsables d’hypoventilation.

·        La clonidine : effet sédatif intense et anxiolytique, possède la propriété de renforcer le bloc anesthésique et d'en augmenter la qualité et la durée. Ses effets indésirables principaux sont la bradycardie et l’hypotension.

·        Antihistaminiques : non dépresseurs respiratoires.

En urgence, un certain nombre de patients sont « prémédiqués » au bloc directement en titrant des agents sédatifs intraveineux. L’objectif est le même : calmer l’anxiété en préservant la coopération !

2.                Sédation intraveineuse :

Controverse : est-il opportun d'utiliser une sédation intraveineuse au cours de l'anesthésie locorégionale ?

1.      Ses détracteurs mettent en avant que, si les conditions décrites plus haut sont remplies, le recours à une sédation intraveineuse n'est pas nécessaire. En particulier, la sédation intraveineuse ne doit pas être utilisée pour masquer l'échec partiel d'un bloc anesthésique car la persistance de sensation douloureuse peut, sous l'emprise des agents sédatifs, aboutir à l'effet inverse (confusion, agitation) de celui qui est souhaité.

2.      la sédation intraveineuse, associée aux blocs centraux, est susceptible d'induire un certain nombre de complications ventilatoire et hémodynamique  (dépression ventilatoire et du baroréflexe). Caplan et coll. ont reconnu une responsabilité partielle aux agents sédatifs lors de la survenue d'arrêt cardiaque sous rachianesthésie.

3.      Même si ces accidents sont exceptionnels, I'utilisation d'une sédation intraveineuse doit donc être réfléchie et non pas effectuée systématiquement. et doit faire l'objet d'un monitorage attentif et d'une surveillance du niveau de conscience.

Deux agents principaux sont aujourd'hui utilisés :

Le Midazolam : sédatif amnésiant et anxiolytique, sa demi-vie plasmatique est plus courte que celle des autres benzodiazopines (environ 4 heures), mais responsable de perturbation des tests d'éveil plus prolongée qu’avec le propofol.

Le Propofol : hypnotique dont les adaptations du niveau de sédation et la reversibilité est plus rapide qu’avec le midazolam, permettant une autoadministration. Son inconvénient est la douleurs à l'injection

Autres agents sédatifs : Pratiquement tous les agents anesthésiques ont été utilisés en réduisant les doses pour obtenir une sédation. La kétamine utilisée à des doses inférieures 0,5 mg/kg est dépourvue des effets dysphoriques. Elle pourrait renforcer l'action des anesthésiques locaux et contribuer à l'analgésie postopératoire. Le rémifentanil est un morphinique dont la demi-vie contextuelle (5 à 11 minutes) est indépendante de la durée de perfusion. Si le rémifentanil a été testé comme sédatif lors d’ALR, il provoque plus de nausées et vomissements, et déprime plus la ventilation (20-25 %) que ne le fait le propofol aux doses sédatives.

3.                Modalités d’administaration :

·                    SEDATION PAR L’ANESTHESISTE : en bolus itératif ou en administration continue. L'administration avec objectif de concentration est une alternative aux modes précédents(cible entre 1,0 et 2,5 mcg/ml).

·                    SEDATION CONTROLEE PAR LE PATIENT EN PEROPERATOIRE : technique efficace, sous surveillance médicale continue. Le propofol est l'agent de choix pour la SCP. Si cette technique ne présente pas de bénéfices objectivement mesurables (consommation, sécurité), elle se révèle très appréciée par les patients puisqu’elle permet une meilleure adaptation du niveau de sédation (bolus entre 4 et 50 mg et période réfractaire entre 0 et 15 minutes).

4.                Hypnose :

Quelques études émanant d’équipes belges [49, 50] illustrent l'intérêt de l’hypnose pendant l'anesthésie locorégionale en permettant une relaxation des patients.

5.                Conclusion :

Le confort des patients sous anesthésie locorégionale résulte d’un ensemble de mesures parmi lesquelles l'environnement et le contact sont primordiaux. Des mesures simples peuvent être prises dès la consultation d'anesthésie, mais aussi lors de l'arrivée du patient en salle d'intervention, lors de la réalisation du bloc, pendant le déroulement de la chirurgie.

      La sédation pharmacologique est un acte non dénué de risque, elle ne doit pas être systématique ni être la réponse à un échec téchnique.

6.    BIBIOGRAPHIE :

·        Stevens MH.- White PS. Surveillance de type anesthesique. in Anesthésie, Miller RD 1998. Ed Flammarion.

·        Bonnet F. – Comment améliorer le confort des patients en anesthésie locorégionale. In JEPU 2000. Ed anesthésie-réanimation Pitié-Salpétrière

·        Sztark F. – Sédation controléeé par le patient en per opératoire. In JEPU 2000. Ed anesthésie-réanimation Pitié-Salpétrière.

·        Lauwers M., Camu F., Breivick H et al. – The safety and effectiveness of remifentanil as an adjunct sédative for régional anesthesia. Reg.Anesth. Pain Med ., 1998, 23,64-70.

·        Caplan RA., Ward RJ., Posner K., Cheney FW. – Unexpected cardiac arrest during spinal anesthésia : a closed claim analysis of predisposing factors. Anesthesiology 1988,68,5-11.